Adama Coulibaly | Positive Minds

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#Covid19 : La leçon de l'agent de police

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EV | Unsplash, des photos pour tous

Le COVID 19 et son lot de mesures ne manquent pas de stimuler la créativité des uns et des autres. De la production des masques aux trucs et astuces pour rendre ses journées moins pénibles, tout y passe. Mais ma plus grande leçon, je l’ai apprise dans un lieu inattendu, du moins pour moi. Je ne m’attendais pas en tout cas à y apprendre, aussi durement une réalité pourtant simple. Alors que s’est-il donc passé ?

Par un Lundi matin ensoleillé, je me suis extirpé des contraintes du travail à distance pour aller m’occuper d’affaires personnelles. Alors que je traversais au volant de ma voiture une zone de concentration humaine, avec un passager à mes côtés, dans un embouteillage acceptable, un policier m’a fait signe de me garer. Comme tout conducteur, j’ai été traversé l’espace d’un instant par une inquiétude, me demandant ce que j’ai pu faire. Elle a rapidement fait place aux certitudes de celui qui se sait à jour… et qui connait ses droits dans un pays où il faut l’avouer, ils sont quand même respectés

Après les salutations d'usage, les documents de la voiture et les miens ont été demandés. L'un après l'autre, ledit document est resté entre les mains de l'officier de police. Après s'être assuré que tout était à jour, cette conversation s'ensuit :

  • L’agent de police : Vous savez pourquoi je vous ai interpellé ?

  • Moi : Non, dites moi chef. Je pense que je suis à jour (d’un air naïf et benêt) ;

  • L’agent de police : Je vous arrête pour défaut de masque.

  • Moi : Ah ? défaut de masque ? dans ma voiture ? Vitres fermées ? Je représente un danger pour qui ?

Dans ces conditions, votre cerveau fonctionne vite. La tension artérielle monte et, je pense aussi, le niveau d’adrénaline. Me voilà dans de beaux draps. Je réfléchis rapidement au contenu de la décision ministérielle concernant le port de masques de protection : Je me suis rappelé que la décision précisait « dans les services publics, dans les services privés » et peut-être aussi dans l’espace public.

Poursuivant donc la conversation dans la foulée de ma surprise, j’ai rappelé le contenu de l’arrêté ministériel et donc conclu que cela ne s’appliquait pas à moi. Tout fier de ma démonstration, j’attendais de voir mon nouvel ami agent de police se dégonfler devant un tel étalage de connaissance. D’un air espiègle, dont je devinais le sourire derrière son masque, il m’a dit tranquillement : « Venez chercher votre papier et vous allez payer au commissariat ». Puis il s’en est allé.

Stupéfait, en colère, maltraité, je ne savais pas dans quel état j'étais. Alors, je suis sorti de ma voiture, bien masqué cette fois. Je suis allé à l'endroit où se trouvait le policier avec certains de ses collègues. Une fois là, je me suis retrouvé en présence de 4 hommes en uniforme, incapables de reconnaître mon nouvel ami : ils portaient tous un masque. L'un d'eux, me voyant perdu, s'est approché de moi et m'a demandé ce qui se passait. Il avait l'air gentil. Je lui ai expliqué en détail ce qui venait de se passer, sans oublier de mentionner les lois. Il m'a écouté tranquillement et je me suis sentie en confiance. "Alors, voilà un bon flic", me suis-je dit. Ce qui s'est passé ensuite :

  • Agent de police 2 : Vous étiez dans votre voiture, vitres fermées mais sans le masque. Votre passager non plus.

  • Moi : Oui.

  • Agent de police 2 : Qu’avez-vous fait quand mon collègue vous a arrêté ?

  • Moi : Je vous jure que je n’ai rien fait. Je me suis juste arrêté, j’ai baissé la vitre et j’ai répondu à ses questions.

  • Agent de police 2 : Quand vous avez baissé la vitre, vous aviez votre masque ?

  • Moi : hum non.

Voilà. Après quelques secondes de silence, j’ai réalisé que l’intello que je prétendais être, venait de recevoir une leçon magistrale. Je suis parti dans un grand éclat de rire (l’agent de police aussi d’ailleurs). Tout s’est décontracté d’un coup et tout devenait clair : Tant que je n’avais pas baissé la vitre, je n’étais pas en infraction. En la baissant, pour parler à un membre des forces de l’ordre dans l’exercice de ses fonctions, debout dans la rue, l’infraction était constituée puisque je n’avais pas de masque. Je peux donc contaminer ou me faire contaminer. Les juristes pourraient avoir de longues discussions là-dessus mais vraiment, c’était très smart.

L'histoire ne s'arrête pas là. Mais elle s'est bien terminée avec quelques conseils gratuits de mes nouveaux amis policiers. C'était très amusant.

Grande leçon : on n'a jamais fini d'apprendre. La condescendance est le meilleur moyen de se tromper. Vous pouvez construire, même avec la personne la plus improbable, dans la situation la plus improbable, une relation positive.

Portez toujours un masque en sortant.