Jour 11 : La Termite Saboteuse contre Le Castor Bâtisseur
Toutes les ruptures ne commencent pas par un fracas.
Parfois, elles commencent par un haussement d’épaules.
Hier, nous avons exploré la différence entre puiser dans une relation et y investir, avec la Tique Parasite et le Piquebœuf Stratégique.
Aujourd’hui, nous descendons encore plus bas. Pas à la surface, mais aux fondations.
Là où les gestes invisibles, les omissions discrètes et les interventions silencieuses décident si un système tient… ou s’effondre.
C’est une histoire de racines :
celles qui s’érodent lentement,
et celles qu’on renforce, sans bruit, jour après jour.
🐜 La termite saboteuse
Elle ne crie pas.
Elle ne s’impose pas.
Elle ne résiste pas ouvertement.
En apparence, elle est même serviable, réactive, polie, parfois charmante.
Mais sous cette douceur se cache un schéma. Très discret. Mais bien réel.
Un mauvais fichier envoyé.
Un délai manqué d’un jour.
Une réunion “où personne ne l’avait ajoutée”.
Un retard dû à un “malentendu” — toujours la faute de quelqu’un d’autre. Toujours un simple malheureux concours de circonstances.
Elle ne casse pas le système.
Elle le plie. Juste assez pour le faire vaciller.
Ses erreurs ne soulèvent pas de soupçons, car elles sont emballées dans des excuses parfaites :
“Oh mince ! Je croyais avoir cliqué sur envoyer.”
“Désolée — j’étais persuadée que c’était la bonne version.”
“Ah, ce jour-là ? J’étais en congé, tu te souviens ?”
Pris isolément, rien n’a l’air grave.
Mais mis bout à bout, cela affaiblit la confiance, casse le rythme, brouille les repères.
Le doute s’installe. La frustration monte. Mais sans cible claire.
Elle ne conteste rien.
Elle ne sabote jamais frontalement.
Mais lentement, méthodiquement, les choses commencent à se fissurer.
Et quand l’équipe réalise… le mal est déjà fait.
Pas d’alerte.
Pas de scandale.
Juste une corrosion quotidienne et silencieuse.
🦫 Le Castor Bâtisseur
Le Castor, lui aussi, travaille en coulisses.
Mais sa présence change tout.
Il repère ce qui manque — et le comble.
Il voit le trou — et tisse un pont.
Il entend ce qui n’est pas dit — et partage la bonne ressource, la bonne phrase, au bon moment.
Il ne cherche pas à être remarqué.
Il cherche à faire tenir l’ensemble.
Quand quelqu’un se noie, il ne prend pas sa place.
Il demande :
“Tu veux que je rédige la première partie ?”
Il allège la tâche — pas en tout faisant à la place,
mais en prévenant l’effondrement.
Il ne s’invite pas pour récolter les lauriers.
Il ne retarde pas pour gagner en influence.
Et souvent, à la fin, son nom n’est même pas mentionné.
Mais quand il n’est plus là — quand l’eau monte, quand les ponts cèdent — tout le monde comprend ce qu’il tenait ensemble.
Pas bruyamment. Pas parfaitement.
Mais avec une intention claire : faire en sorte que ça tienne.
🔍 La Réflexion
Certaines personnes affaiblissent le collectif en rongeant, jour après jour, la clarté, la cohérence et la confiance.
D’autres le renforcent par des gestes petits mais décisifs — souvent invisibles.
Les Termites et les Castors vivent tous deux près du bois.
Mais l’une le vide, l’autre en fait un abri.
Le sabotage ne ressemble pas toujours à du sabotage.
Parfois, il prend la forme d’un simple désordre, d’un retard discret, d’une série d’excuses douces.
Et le soutien, lui, ne ressemble pas toujours à un acte héroïque.
Parfois, il prend la forme d’un mail envoyé à temps, d’un lien partagé, d’un nom cité, d’un tampon silencieux contre le chaos.
Alors posez-vous la question :
Est-ce que, sans le vouloir, je fragilise ce qui me porte ?
Ou est-ce que je veille, discrètement, à ce que tout tienne debout ?
Et quand les fissures apparaissent…
Se souviendra-t-on que vous avez aidé à les colmater ?
Ou que vous les avez laissées s’élargir ?
📌 Le Saviez-Vous ?
Les termites sont parmi les insectes les plus destructeurs du monde — non pas parce qu’ils agissent vite, mais parce qu’ils agissent avec constance.
Ils rongent le bois de l’intérieur, en silence, souvent sans être repérés jusqu’à ce que la structure soit irrémédiablement compromise.
Les castors, à l’inverse, sont les ingénieurs de la nature.
Leurs barrages transforment les écosystèmes, préviennent les inondations, et créent des habitats pour d’innombrables espèces.
Leur travail est précis, coopératif, souvent invisible… jusqu’à ce que leur absence révèle tout ce qu’ils soutenaient sans bruit.
Dans nos équipes aussi,
certains creusent,
d’autres consolident.
Et parfois, les gestes les plus invisibles sont ceux qui sauvent le système.
📚 Références
Krishna, K. (1969). "La biologie des termites". Academic Press
Müller-Schwarze, D. (2011). Le castor : Histoire naturelle d'un ingénieur des zones humides
Harvard Business Review (2019). "Le travail invisible : La force tranquille qui maintient les équipes soudées"
Brown, B. (2012). Oser en grand