Jour 24 : La Libellule Zigzagante contre Le Crapaud Ancré
Certain·es apportent un mouvement incessant, débordant d’idées à chaque détour.
D’autres apportent une stabilité calme, maîtrisant sans bruit ces petits gestes qui tiennent tout ensemble.
Et entre les deux se glisse une tension discrète — entre commencer et terminer, entre énergie et exécution.
Hier, nous avons exploré deux façons d’aborder le conflit — le Renard de l’Ombre, qui glisse ses tensions en coulisse, et le Blaireau Debout, qui les nomme de front.
Aujourd’hui, nous troquons la confrontation contre la concentration.
On ne parle plus de ceux qui gèrent les tensions… mais de ceux qui gèrent le désordre.
Car dans chaque bureau, il y a des espaces qui brillent par leurs systèmes — et d’autres qui brillent par… autre chose.
🪁 La Libellule Zigzagante
Impossible pour elle de rester en place — son esprit non plus.
Son bureau est un kaléidoscope de chaos créatif : Post-its multicolores, carnets ouverts dans le mauvais sens, croquis sur des enveloppes, et une tasse qui n’a pas vu de café depuis trois semaines.
Son ordinateur ? Une installation d’art contemporain faite d’onglets ouverts.
Quant aux fichiers : “FINAL_corrigé_FINAL_VRAIMENT_VERSION3”.
Elle déborde d’énergie, d’idées et d’enthousiasme.
La première à lancer un brainstorming. Capable de proposer trois campagnes dans la même phrase.
Mais le suivi ? Ce n’est pas vraiment son fort.
Elle vit pour l’excitation du départ. Pour l’élan du milieu.
Mais l’atterrissage ? Elle l’évite. Le sol semble… trop immobile.
Demandez-lui un fichier, elle dira : « Donne-moi cinq secondes ! »
Puis commence une fouille archéologique qui pourrait durer jusqu’à demain.
Elle ne laisse pas les choses en plan par négligence.
Elle est juste déjà à moitié embarquée vers la prochaine idée… avant que la précédente ait un titre.
🐸 Le Crapaud Ancré
Lui, c’est l’opposé silencieux.
Son espace de travail est net, presque zen.
Un seul document ouvert — celui sur lequel il travaille vraiment.
Pas vingt onglets. Pas six brouillons éparpillés. Juste une tâche, une respiration, un rythme.
Son monde numérique reflète son monde physique : dossiers dans des dossiers, codés par couleur, datés, nommés avec une précision quasi sacrée.
Demandez-lui un ancien fichier, il vous le sortira avant même que vous ayez fini la phrase — exactement à sa place.
Il ne bouge pas vite. Il bouge avec intention.
Il ne court pas après toutes les idées. Il honore celles qu’il choisit.
Son génie ? Il ne réside pas dans la vitesse, mais dans la structure.
Mais cette structure peut se refermer sur lui.
Il attend que tout soit prêt. Il peaufine, ajuste, repousse — parfois si longtemps que les opportunités passent.
Dans un monde qui récompense les cycles courts, son attachement à la rigueur peut être perçu comme du retard.
Son risque ? Manquer le saut… à force de mesurer la distance.
🔍 La Réflexion
La Libellule et le Crapaud incarnent deux façons d’exister : l’étincelle instable et la profondeur ancrée..
La Libellule apporte de l’énergie, de la créativité, de l’enthousiasme contagieux — mais elle laisse derrière elle des cercles jamais refermés.
Le Crapaud apporte de la clarté, du calme, et un vrai sens du suivi — mais il risque de polir indéfiniment pendant que les autres ont déjà lancé la V2.
Ensemble, ils équilibrent le chaos et l’ordre.
Séparés, ils peinent — l’une à atterrir, l’autre à décoller.
Alors, demandez-vous :
Vos idées vont-elles trop vite pour toucher terre ?
Ou bien votre quête de perfection vous empêche-t-elle de faire décoller le projet ?
Et que faudrait-il… pour agiter l’air et faire vibrer le sol ?
📌 Le Saviez-Vous ?
Les libellules font partie des insectes les plus agiles : elles changent de direction en plein vol, planent, accélèrent — mais ne restent jamais en place. Leur grâce zigzagante a un prix : elles se posent rarement.
Les crapauds, eux, sont lents et réfléchis. Leur immobilité est une stratégie. Ils économisent leur énergie, et quand ils bondissent, c’est avec puissance et précision.
Dans les équipes aussi, il faut des deux :
L’étincelle qui met en mouvement.
Et l’ancrage qui assure l’arrivée.
📚 Références
Csikszentmihalyi, M. (1996). Creativity : Le flux et la psychologie de la découverte et de l'invention
Newport, C. (2016). Le travail en profondeur
Goleman, D. (2013). Focus : Le moteur caché de l'excellence
Harvard Business Review (2021). "Pourquoi les gens brillants ont parfois du mal à exécuter leurs projets"
Jung, C.G. (1953). Les types psychologiques